- Lorcán E. Hyde
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Date d'inscription : 20/03/2021
Lorcán E. Hyde • You picked a dance with the devil and you lucked out [DC Min Jun Lee]
Lorcán Eyler Hyde
Parle : français, néerlandais, allemand, anglais (parfait quadrilingue) et russe
Accompagnant dans le Contrôle et l’Acceptation du Don (aka ACAD) | Consultant
• ᚖ Random Facts ᚖ •
A une mémoire eidétique • Est accro à l’adrénaline • Ne supporte pas les chansons tristes/niaises • Sauf si c’est lui qui les chantonne • Il chante bien d’ailleurs • Et il joue de la guitare • Maîtrise l’art du clin d’œil et du sourire en coin • N’admettra jamais ses faiblesses
Oneirataxia
Merveilleux, n’est-ce pas ?
Ça devient problématique si vous marchez dans le vide car vous auriez juré que le sol continuait sous vos pas. Si vous traversez, certain qu’aucune voiture n’arrive, et pour cause : vous remarquerez trop tard que le pavé sous vos pieds est devenu une voie ferrée, et que le train n’aura jamais le temps d’arrêter sa course folle.
S’il peut altérer ce que perçoivent vos sens, la dure réalité vous heurtera toujours, d’une manière ou d’une autre.
ᚖ Signe : Ses yeux deviennent noirs quand il se sert de son don. Si c’est contre vous, et qu’il veut vous garder dans l’ignorance, ce petit détail sera gommé en post-prod – mais un possible témoin extérieur le verra toujours.
ᚖ Contraintes : Il doit percevoir l’emplacement de sa, ou ses, victime(s) dans un rayon de quinze mètres. Si elle prend conscience de ce qu’il fait, cela lui complique la tâche, et s’ensuit une lutte mentale qu’il est sûr de gagner dans 99% des cas – si ça ne vire pas à la lutte physique entre-temps. S’il est exténué, ou même distrait, son altération peut différer du but premier : on n’est jamais à l’abri d’un petit bug d’affichage. Enfin, il lui est plus facile de se plonger dans la même réalité alternative que ses cibles, ce qui peut mener à des maladresses prévisibles, comme penser qu’une chaise est réelle alors que non.
ᚖ Contrecoups : Migraines, qui tendent à descendre sur sa nuque et ses omoplates ; saignements (yeux, oreilles nez ou bouche) ; irritations oculaires ; troubles visuels, auditifs, olfactifs ou kinesthésiques ; perte partielle ou totale de l’un ou plusieurs de ses sens, pour une durée indéterminée. Sachant qu’il ne peut plus influer sur le sens dont il est lui-même dépourvu, puisqu’il a besoin de connaître son environnement pour l’altérer.
ᚖ Contreparties : Son don agit parfois sur lui sans qu’il en prenne immédiatement conscience, les hallucinations (qu’elles soient auditives, visuelles, olfactives, gustatives ou kinesthésiques) se mêlant à la réalité. Comme il s’est entraîné à gommer le noir de ses yeux, inspecter son reflet n’est plus un indicateur fiable pour vérifier si son don déconne. Il est aussi très sensible à l’autosuggestion quand il est affaibli ou stressé.
ᚖ Anecdotes : Ce qui a été dit plus haut est valable pour ses victimes : des personnes plus réceptives/imaginatives/sensibles/immergées/etc. pourraient jurer éprouver la morsure du froid s’il leur fait voir un tapis enneigé, et cela sans qu’il ait à jouer sur leur ressenti. Ce n’est pas une science exacte, et c’est au final assez inutile : lui-même s’en amuse plus qu’autre chose avec ses proches pour voir à quel point ils peuvent aller loin dans l’immersion.
Is your world just a broken promise?
Welcome to your life
Tu te souviens de tout comme si c’était hier.De la première fois que ton oncle t’a raconté que tu es passé à un chromosome près de t’appeler « Barbie » à cause d’un pari stupide entre lui et tes parents et, qu’accessoirement, c’est suite à un « Chiche ! » alcoolisé, dont il est l’instigateur, que tu t’es retrouvé avec Leal Dick en seconds prénoms.
De la manière dont tu t’endormais sur les genoux de ta mère, décoratrice d’intérieur, pendant qu’elle esquissait ses projets.
Des plans que tu dessinais – mal – pour ton père, architecte, lequel ne manquait jamais une occasion de les concrétiser en maquette, dans une tentative de susciter une vocation en toi, a-t-il admis un jour.
Du vaste potager chez papi et mamie, et de la patience avec laquelle ils t’ont appris les rudiments du jardinage et de la cuisine. Sans doute est-ce d’eux que tu tiens cet amour de la bonne chère, d’ailleurs.
De la collection d’outils incroyable d’opa et oma, qui t’expliquaient chaque étape des travaux avec précision, qu’il s’agisse de réparer le pied cassé d’une chaise ou de changer la bougie de leur voiture.
Des longues marches dans la forêt ardennaise quand ton oncle t’emmenait avec lui à la chasse, sans jamais te laisser toucher à la moindre arme ceci dit – ce qui ne l’avait pas empêché de t’expliquer le fonctionnement de chacune d’entre elles, car un jour tu aurais besoin de ce savoir pour passer ton permis de chasse.
Tu as eu une enfance idyllique, fils unique entouré d’une famille aimante qui ne lésinait pas sur le savoir à te transmettre. C’est à leurs côtés que tu as appris à jongler entre quatre langues dès que tu as été capable d’articuler tes premières syllabes – les déménagements incessants de tes parents, incapables de rester plus de quelques années dans la même région de ta Belgique natale, ne t’ont pas laissé le choix, de toute manière. Eupen, Liège, Anvers, Namur, Louvain, Bastogne… Tu n’as pas vraiment eu l’occasion de garder contact avec des « amis d’enfance », mais tu ne t’en es jamais plaint. Pour tout dire, tu préférais de loin mettre tes petits camarades à terre lors du judo que d’entretenir un quelconque lien d’amitié avec eux. Ta famille te suffisait, ta soif d’apprentissage comblait tout possible vide.
Tu te souviens de la frayeur que tu as causée à ton oncle lorsqu’il s’est heurté à ton regard noir pour la première fois – même s’il a été rassuré en comprenant la provenance de cette licorne dans son viseur. Si du haut de tes huit ans tu avais beaucoup ri, lui avait mis un point d’honneur à t’apprendre qu’un grand pouvoir implique de grandes responsabilités. « Vivons heureux, vivons cachés » pourrait résumer ce qu’il t’a dit ce jour-là. Il fait partie de ces gens qui entendent tant d’histoires : l’ami d’un ami qui s’est vu refuser un boulot à cause de son don, la sœur d’un cousin qui a manqué de se faire kidnapper à ses dix ans parce qu’elle fait littéralement pousser de l’argent aux arbres, un camarade d’université qui a disparu du jour au lendemain dès qu’il a déclaré son don…
Face à de telles anecdotes, tes parents lui ont donné raison et, en dehors de ta famille, personne n’a su.
Some things are worth fighting for
All we need are hearts like yours
Tu te souviens de ton premier véritable ami. Non le chien familial, mais ton voisin Thibaut. Son ballon de foot a atterri dans votre jardin, et lorsque tu le lui as rapporté, il t’a invité à jouer avec lui. Vous vous êtes alors découvert des tas de points communs : vous aviez tous les deux douze ans, étiez fils uniques et bons élèves, adoriez explorer le monde autour de vous. Votre différence résidait dans le fait qu’il était normal.Et incapable de tenir un secret.
Ses yeux s'étaient agrandis d’horreur face à la noirceur des tiens. Tu n’avais même pas eu le temps d’altérer sa vision de la vache en un griffon, comme il t’avait pourtant lui-même mis au défi de le faire, qu’il a pris ses jambes à son cou.
Ça aurait pu en rester là. Mais son Russe de père n’a pas été du même avis. La lenteur de l’administration belge après sa délation aurait pu te servir puisque vous aviez déménagé entre-temps, mais tu as reçu la visite de Devin Aerts, régulateur de dons, le lendemain de ton treizième anniversaire.
S’il t’avait fait forte impression, ce grand blond qui aurait pu incarner un officier allemand dans l’un de ces films que tu regardais avec ton grand-père, quelque chose dans ses yeux bleus t’a tout de suite mis en confiance. Il t’a demandé de lui montrer, et jamais tu n’oublieras la vague de fierté que tu as ressentie face à son sourire satisfait. Il contrastait tellement avec l’inquiétude de tes parents.
Pour la première fois, ton don était perçu comme merveilleux, et non effrayant.
Devin, qui avait mis un point d’honneur à t’inclure dans la conversation, vous a expliqué que t’inscrire sur le registre serait plus dommageable que bénéfique vu la nature de ton don. « Voulez-vous que votre garçon termine dans les bas-fonds d’Anvers, à louer son don contre quelques billets car aucun employeur n’aura voulu de lui ? ». Évidemment que non. Alors, il leur a proposé de t’encadrer personnellement, et en échange vous pourriez reprendre votre vie comme si vous n’aviez jamais eu affaire au service de régulation. Tes parents avaient déjà eu tellement peur avec les histoires de ton oncle qu’ils ont accepté, conscients de signer un pacte avec le diable dont ils ignoraient les termes.
La plainte de Vasilev a disparu, ainsi que ce dernier bien que tu n’en as jamais rien su, et tu n’es jamais apparu sur aucun registre.
Devin est celui qui t’a fait réaliser que si ton don doit être dissimulé pour des raisons pratiques, il n’a en revanche rien de honteux. Il n’est pas une malédiction, mais un trésor que tu dois jalousement garder, et ne montrer qu’à quelques rares élus.
Il t’a présenté à l’un de ces élus : Arjan, qui deviendra ton alter ego au fil des années. Il est également le premier doté que tu as rencontré. Le concept t’a fasciné : il peut percevoir l’aura des dons. « Plus c’est éclatant, plus il est puissant. Plus c’est vacillant, plus il est proche de sa limite. », t’a-t-il expliqué un jour. C’était devenu un jeu entre vous : repérer des dotés dans une foule pour lui ; altérer sa réalité à son insu et attendre qu’il le remarque pour toi. Votre mentor encourageait vos défis, et les pimentait même. D’accord, Arjan pouvait dénombrer le nombre de dotés dans un centre commercial en plein jour, mais le pouvait-il une fois plongé dans l’obscurité ou lorsqu’il était en même temps concentré sur autre chose ? D’accord, tu pouvais faire croire à ce dernier que la porte était plus loin qu’il ne le pensait, ce qui l’amenait irrémédiablement à se cogner dans un juron, mais pouvais-tu lui faire croire qu’elle était ouverte et combler l’inconnu qui se cachait derrière ?
Vous étiez loin d’imaginer que ces jeux deviendraient votre quotidien.
Once you feel it you can't unfeel it,
Once you dream it you can't undream it
Tu te souviens de la manière dont son rire a attiré ton attention dans la grande salle du château de Beloeil, et plus particulièrement de celle dont son clin d’œil a ravi ton cœur lorsque vos regards se sont croisés. Tu avais quinze ans ; elle, dix-sept. Si votre différence d’âge a pu être un frein pour certaines choses, jamais elle n’a été un obstacle. Ni même la phrase d’accroche que tu lui avais sortie, un jeu de mots peu subtil sur la coïncidence de la ville où vous vous trouviez et la beauté de ses yeux.À ta décharge, c’était la première fois que tu draguais, et elle t’avait fait perdre tous tes moyens.
Helena, chanteuse de Valraven, un groupe oscillant entre le métal symphonique et le rock folk, est l’incarnation de tout ce dont tu aurais pu rêver. La vie te l’a gracieusement offerte sur un plateau d’argent, et tu t’en es emparé sans la moindre hésitation. Enfin, à l’écouter, c’est elle qui s’est emparée de toi. Vous êtes la pièce manquante de l’autre, et vos similitudes servent de point d’attache.
Tu te revois durant ton adolescence, assis sur une caisse en carton dans le garage du bassiste de Valraven. Il a fallu un mois pour que les autres membres du groupe arrêtent d’essayer de te taquiner sur ton âge – alors qu’ils étaient à peine plus âgés – ; deux pour qu’ils comprennent que votre relation était sérieuse ; quatre pour qu’ils t’acceptent comme l’un des leurs ; et six pour qu’ils te fassent participer au processus de création. Tu te souviens de l’excitation d’Helena quand elle te montrait leurs nouvelles mélodies, de la manière dont elle te couvait du regard quand tu empruntais une guitare, que ce soit pour remplacer leur guitariste absent ou pour les aider à trouver des accords. Ta mémoire était du pain béni pour eux. Malgré ton implication, jamais il n’a été question que tu les rejoignes réellement : Valraven était son univers, pas le tien.
Vous êtes devenus si proches que, pour ton anniversaire, ils t’offraient toujours une chanson, souvent une reprise. Tu n’étais plus « le petit Leal d’Helena » – elle est la seule à t’appeler par ton second prénom ; elle t’a avoué aimer ce privilège presque autant que la manière dont il roule sur sa langue –, mais Andries, leur guitariste de secours, leur pote – qui devrait d’ailleurs arrêter d’aller à la salle parce qu’ils commençaient à complexer.
À cette époque, tu vivais un rêve éveillé. Même la révélation de l’existence de ton don n’est pas parvenue à jeter la moindre ombre au tableau : Helena n’a pas été effrayée, ni fascinée. C’était délicieusement normal. Il est devenu un accessoire dans votre quotidien, un moyen de pimenter votre relation lorsque vous avez emménagé ensemble à tes dix-huit ans. Non que celle-ci en ait besoin : vous suiviez tous les deux votre voie, sans qu’aucune monotonie ne s’installe.
La concrétisation des rêves d’Helena l’obligeait à s’absenter plus fréquemment, que ce soit pour les répétitions ou lors de petites tournées dans les pays voisins, auxquelles tu devais parfois renoncer même si tu avais mis un point d’honneur à assister à la première. Vous trouviez néanmoins toujours le temps de discuter, et il n’était pas rare qu’elle t’interroge sur Devin et Arjan.
Elle était suspicieuse à l’égard de ton mentor, et éprouvait quelques doutes quant à tes désirs de marcher dans ses pas. Toi-même tu en as eu, mais il suffisait que tu retrouves Arjan pour que cette hésitation s’efface. Quoi que tu décides, de toute manière, elle te soutenait, tout en s’étonnant qu’un fonctionnaire reçoive un entraînement aussi intense. Tu la rassurais avec les mêmes arguments que Devin : tu ne serais pas un employé de bureau puisque tu irais sur place, et tu devrais faire face à toute éventualité vu la panoplie de dons possibles. C’était juste au cas où.
Son mauvais pressentiment disparaissait sitôt que vous vous retrouviez blottis dans le canapé de votre appartement bruxellois, à imaginer ensemble la maison que vous feriez bâtir dès que vos moyens le permettraient. Avec toi, il n’y avait pas besoin de logiciel ou de croquis : juste de ton don, de ta mémoire et de votre imagination. Alors oui, parfois vous passiez des heures à débattre de la couleur des murs. Mais tu aimais vos chamailleries, même si au bout du compte tu étais forcé de reconnaître que, neuf fois sur dix, Helena avait raison.
Welcome to the war we've only begun
So pick up your weapon and face it
Tu te souviens de ton émerveillement quand Devin t’a révélé l’envers du décor. Non car tu n’avais jamais vu autant de dotés au même endroit, ni car l’ambiance des lieux était un mélange douteux entre un château victorien, un club underground et un laboratoire futuriste. Mais car, quand Matthias s’est avancé vers toi et t’a serré la main en soufflant « Bienvenue parmi les tiens », toi qui pensais tout avoir dans la vie t’es senti véritablement entier pour la première fois.Ce n’était pas une vulgaire pièce manquante que tu venais de trouver, mais une pièce maîtresse qui donnait un sens à tout ce que tu avais vécu avec Devin.
Matthias a été celui à tout t’expliquer. Certains dons doivent rester hors d’atteinte de l’État, ou de certaines organisations aux desseins tout aussi peu nobles. Si tu avais entendu parler des pro-dotés et de leurs némésis, jamais tu n’aurais imaginé qu’un garde-fou existe entre les deux – les trois, même, si l’on prend en compte ceux qui désirent vivre loin de tout conflit.
Jamais tu n’aurais imaginé que, ce garde-fou, ce serait toi.
Le réseau s’étend telle une toile dans toute l’Europe – et, des années plus tard, le monde. Votre rôle est de maintenir l’équilibre ; de limiter la casse ; de protéger autant les dotés que les autres. Matthias a été clair dès le début : quand la prévention échoue, seule reste l’élimination. Pour le bien commun, car pour éviter que tous les dominos s’effondrent, il faut savoir lequel retirer à temps.
Tu as parfait ta formation parmi les tiens, encadré par des vétérans dont les yeux de certains reflétaient encore les horreurs dont ils avaient pu être témoins. L’art du combat, que ce soit la défense ou l’attaque ; la reconnaissance du terrain ; l’infiltration… Rien n’était laissé au hasard. Pas même ton identité : en leur présence, et dans le milieu en général, tu te nommerais désormais Sweven. Un nom de code qui, des années plus tard, serait connu de ceux qui auraient des raisons de s’attendre à ce que tu t’immisces dans leurs affaires.
Le plus ardu a été de dissimuler la vérité à Helena, sans aller jusqu’à lui mentir. Mais tu savais qu’elle savait. Elle te l’a confirmé un soir, où elle a pris ton visage entre ses mains pour te souffler des mots qui, au lieu de te soulager, t’ont pesé davantage :
« Quoi que tu fasses, j’ai confiance en toi. »
There's blood on the crown; go and take it
You get one shot to make it out alive
Tu te souviens de l’effroi que tu as ressenti lorsque ces simples mots ont franchi les lèvres d’Arjan : « Helena, tu es radieuse aujourd’hui. » Oh, à tes yeux, elle l’était – et l’est – toujours. Mais qu’elle le soit à ceux de ton binôme ne pouvait signifier qu’une chose : c’était un réflexe pour lui de te faire comprendre que son don venait de repérer l’un des vôtres.C’est l’une des rares fois où tu as laissé tes émotions guider tes actions. Tes doutes t’ont conduit tout droit chez Devin. Celui que tu as considéré comme un mentor. Celui sans lequel tu aurais vécu une tout autre existence. Celui auquel tu devais tout.
Celui qui était devenu le domino défaillant menaçant de faire s’écrouler ce que tu avais patiemment bâti du haut de tes vingt ans.
Tu as pu fermer les yeux sur beaucoup de choses, surtout qu’à l’époque tu étais au bas de l’échelle. Tu te contentais de repérer certaines personnes, de leur soutirer des informations mine de rien, voire de t’assurer que tout allait bien du côté de ceux sur lesquels vous veilliez de loin. C’était par écho que tu entendais que Devin glissait vers un extrême allant à l’encontre de vos principes. Il passait à la trappe l’étape « prévention », s’approchait d’une espèce d’anarchie où il estimait qu’il fallait renverser tous les ordres établis au profit du sien, du vôtre. Au diable la discrétion : ceux qui s’écartaient du chemin qu’il considérait juste connaîtraient ce qui les a fauchés en plein vol.
La goutte de trop, ça a été quand il a voulu embarquer Helena là-dedans. Tu aurais dû te méfier quand il a invité l’un de vos comparses à un dîner amical, celui qui discernait la nature d’un don en un frôlement de peau. Mais tu avais encore été assez naïf pour penser qu’il souhaitait simplement t’aider.
Pourtant, tu le connaissais ; tu aurais dû savoir que Devin ne laisserait pas passer l’opportunité de recruter quelqu’un qui prédisait avec justesse quelle option choisir entre A et B ; quelqu’un qui pressentait un possible revirement dans un plan établi.
C’est Matthias qui t’a vendu la mèche. Matthias qui t’a glissé l’arme entre les doigts. Matthias qui t’a offert le choix de rester un domino ou de devenir celui qui les place et les ôte à sa convenance. Matthias qui t’a offert la place que tu rendrais bientôt vacante.
Tu revois le corps de celui que tu as considéré comme un second père tomber. Encore à ce jour, tu ignores si la trahison que tu as lue dans ses yeux était destinée à toi ou à Matthias, lequel s’était penché sur son ancien comparse sans que la moindre émotion marque ses traits.
Devin n’est que le premier de la liste.
À aucun moment le regret ne s’est frayé un chemin jusqu’à ton cœur à mesure que celle-ci s’allongeait, juste un sentiment du devoir bien fait, avec un arrière-goût de trop peu. C’était tellement facile de presser la détente, trop simple, pas assez. Ils partaient sans savoir ce qui les avait frappés, sans éprouver ne serait-ce qu’une once de ce qu’ils avaient infligé à leurs victimes. En un sens, tu comprenais ce que Devin a pu ressentir.
Contrairement à lui, tu trouveras le compromis idéal, même s’il t’a fallu des années pour cela.
What are you willing to lose?
You cover your wounds, but underneath them
A million voices in your head that whisper, "Stop, now"
- TW :
- Tu te souviens de ton seul regret.
Des dossiers complets sur les dotés, reprenant toutes leurs informations critiques, fuitaient sur la toile. Leurs noms réels, leurs alias, leurs adresses, leur apparence, leurs professions – légales et moins légales –, la nature de leur don… Si l’un de vos génies de l’informatique n’était pas tombé dessus, justement car il était dans ce lot qui ne cessait de s’agrandir, vous n’auriez certainement pas pu être les premiers à agir.
La source avait été localisée en peu de temps, et le hasard avait voulu qu’elle soit seulement à quelques centaines de kilomètres de chez toi. Tu n’avais eu qu’une adresse, perdue dans les Ardennes que tu aimes tant. Tu t’étais attendu à affronter un homme dangereux ; à une planque hautement sécurisée. Tu avais même envisagé que, peut-être, ce serait là ton premier échec.
L’unique alarme de la petite maison familiale était restée sagement endormie dans son panier quand tu l’avais dépassée, l’arme au poing. D’après tes sources, une seule personne se trouvait entre ces quatre murs, et elle s’était redressée d’un bond pour faire barrage entre toi et son ordinateur, dont l’écran affichait ton visage jouxtant des informations que même tes comparses ignoraient, et qu’une adolescente n’aurait jamais dû avoir en sa possession.
Elle était à un clic de faire de toi et de tes proches une cible de choix.
Camille avait quatorze ans et était une dotée. Depuis son enfance, elle créait des personnages complexes, chacun avec une faculté qui lui est propre, un don. Jamais elle ne les a mis en scène : ils existaient simplement dans son esprit, et le seul moyen qu’elle avait trouvé d’apaiser ce flot constant d’informations était de les noter et d’en faire des fiches précises, fréquemment mises à jour. Elle avait compris que cela allait au-delà d’une imagination fertile il y a deux ans de ça, quand ce qu’elle croyait être l’une de ses créations s’était retrouvé devant elle, avec le corps sans vie de son petit frère à ses pieds.
La pourriture a fini derrière les barreaux, mais ce n’était pas assez. Elle se réveillait chaque nuit avec un arrière-goût de trop peu, et une certitude : tous ces enfoirés méritaient de crever jusqu’au dernier. Vous méritiez de crever jusqu’au dernier. Alors, plutôt que de prendre les armes elle-même, elle avait divulgué ce qu’elle savait pour que vous vous entre-déchiriez.
Tu te tenais face à ton premier cas de conscience, ta première hésitation. Tu aurais aimé qu’elle cesse, qu’elle accepte d’être surveillée et qu’elle retourne à son innocence. Mais celle-ci était morte à l’instant où elle s’était heurtée au regard sans vie de son cadet. Elle savait qu’elle avait signé son arrêt de mort en agissant de la sorte, elle savait pour quelle raison tu étais là, et pourtant son seul regret était de ne pas avoir pu dévoiler plus de noms.
Son regard troublé par les larmes qui refusaient de couler s’était porté sur le cadre qui trônait sur sa table de nuit. Elle y figurait, quelques années plus jeune, entourée de ses parents et de son petit frère. Ils souriaient, heureux, inconscients.
« Désires-tu les voir une dernière fois ? »
Elle avait compris ce que tu lui proposais, et avait acquiescé.
Te dire qu’elle est partie avec le sourire aux lèvres ne t’aide pas à dormir la nuit.
Your guns are loaded and your lies are the bullets
So here is the trigger; go ahead and pull it now
Tu te souviens de la première fois où tu as réalisé qu’être dans ses bras ne suffisait plus.Vous étiez pourtant les mêmes qu’à l’époque. Du haut de vos vingt-et-un et vingt-trois ans, vous vous imaginiez cette maison qui serait un jour la vôtre ; vous discutiez de la race de chien que vous prendriez dès que vous auriez ce jardin qui vous tenait tant à cœur ; vous dansiez dans les plus beaux palais alors que vous étiez toujours dans votre appartement ; vous passiez des heures à écouter ses nouvelles chansons et à choisir de sa tenue pour ses prochains concerts ; vous débattiez des prénoms que vous donneriez à vos futurs enfants, même si vous vouliez attendre d’être dans la trentaine pour cela – elle parce qu’elle souhaitait se concentrer sur la musique ; toi parce que tu désirais te concentrer sur ta « carrière ».
Parce que tu ne mérites pas d’être père alors que tu revois sans cesse la mort figer les traits adolescents de Camille.
« Sérieusement, Leal. Tu resterais sur Merlin ?
— Évidemment, ce nom est magique.
— Et si c’était une fille ?
— Toi, n’as-tu pas dit que tu voudrais l’appeler Sharon ?
— Ça ne fait pas ridicule de…
— De donner à son enfant le prénom de son modèle ? Bien sûr que non.
— Il m’a toujours paru un peu… bizarre, mais je sais à quel point il comptait pour toi. Devin, c’est un joli prénom. »
Et un souvenir amer, bien qu’à aucun moment tu n’aies regretté d’avoir appuyé sur la détente pour la préserver. Elle ignore d’ailleurs tout de son don, des circonstances de la mort de Devin : tu la veux loin de tout cela, la plus normale possible. Et certes, ce choix ne t’appartenait pas, mais ce qu’elle ignore ne peut lui faire de tort.
Quelle ironie, car ce sont précisément ces non-dits s’accumulant entre vous qui ont sonné le glas de votre couple.
Helena est celle qui a rompu cette mascarade. C’était une soirée qui avait commencé comme les autres, si bien que jamais tu n’aurais imaginé que c’était la dernière. Tu aurais égoïstement préféré qu’elle craque, d’une manière ou d’une autre. Qu’elle fonde en larmes, qu’elle hurle, qu’elle te haïsse. Mais elle t’avait offert la même chose que depuis le premier jour : la tendresse, la compréhension, l’amour.
Cet amour que vous partagerez à jamais, mais qui ne te suffisait plus.
Isn't it strange that love is in the way?
It never goes away
Tu te souviens avec trop de clarté de l’un des pires jours de ta vie, six mois après votre séparation. Celui où tu t’es heurté aux conséquences de tes décisions ; celui où tu as seulement pu sourire, car la conversation tournait davantage autour de feu votre couple que de la beauté de sa robe de mariée ou de son ventre arrondi.Arjan avait été à tes côtés ce jour-là, te chuchotant un « J’ai toujours pensé que tu serais celui à l’attendre à l’autel » quand elle avait remonté l’allée centrale au bras de son père pour rejoindre Marc Peters, un foutu flic promis à une brillante carrière. Tu as juste pu répondre que toi aussi, incapable de détacher ton regard de la représentation de tes rêves brisés.
Tu n’assistais pas à un mariage, mais à un enterrement.
Wicked Game de Chris Isaak résonnait dans la pièce à côté quand vous vous êtes étreints pour la dernière fois, sur le balcon, à l’abri du regard indiscret des convives. Elle était adossée à toi, ses mains par-dessus les tiennes, elles-mêmes autour de son ventre arrondi. L’éclat de l’anneau d’or autour de son annulaire avait attiré ton regard, et ton cœur s’était serré. Son « Je le veux. » avait sonné comme celui d’un condamné auquel l’on passait la corde au cou, mais qui estimait sa sentence juste.
The world was on fire and no one could save me but you.
Elle t’avait demandé si elle pouvait la voir une ultime fois, celle qui aurait dû être la concrétisation de vos rêves, celle dans laquelle vous auriez dû surveiller vos futurs enfants tandis qu’ils auraient joué dans le jardin avec un chien – ou deux, vous débattiez toujours là-dessus la dernière fois que vous en aviez parlé. Et tu avais accepté. Quel meilleur endroit pour vous dire au revoir que celui qui n’avait jamais vu le jour ?
« Merci, Leal.
— Je vous en prie, madame Peters.
— Pas de ça avec moi. Tu sais qu’il ne sera jamais toi. »
Tu n’as jamais eu aucun doute là-dessus. En revanche, tu savais qu’il s’était empressé de venir combler une place que tu avais laissée vacante, et que tu serais obligé de le saluer chaleureusement lors des barbecues prochains. Car il aurait été trop facile que tu puisses simplement te détourner.
La vie grandissante au creux de tes mains t’en dissuadait.
All the memories remain, all the pain from your broken home
And the walls 'round your heart grew so strong, you can't let go
Tu te souviens de ces petits doigts qui s’étaient refermés autour des tiens, sans la moindre force. De l’expression d’Helena, similaire à vos jeunes années dans le garage du bassiste, excepté qu’au lieu de te hasarder à gratter quelques accords, tu étais penché sur un berceau dans une chambre d’hôpital. S’il avait deux occupants, seul l’un d’entre eux daignait être éveillé en ta présence.Merlin Peters ouvrait ponctuellement les yeux, sans jamais lâcher ton doigt, tandis que Sharon Peters dormait comme un ange à ses côtés.
Helena avait accouché la veille, un mois après son mariage ; sept après votre séparation.
De la même manière que tu savais qu’elle savait que tu ne lui disais pas tout concernant ta profession, tu savais qu’elle savait que tu savais. Une part de toi l’a su dès qu’elle avait annoncé sa grossesse, et tu en avais la confirmation à présent que tu couvais du regard ces petits êtres qui étaient loin d’être nés prématurément. Si plusieurs semaines auparavant tu avais assisté à la représentation de tes rêves brisés, tu te tenais désormais face à l’incarnation de ceux-ci.
Ceux qui auraient dû être la source de ton bonheur étaient réunis dans cette pièce, sans que tu ne puisses plus y prétendre.
« Je comprendrais que tu refuses, Leal.
— Je suis surtout étonné que Marc ait accepté.
— Il y a certaines choses sur lesquelles Marc n’a pas son mot à dire, celle-ci en fait partie. »
Tu l’avais piquée au vif en lui rappelant l’existence de son époux. Quel comble. Tu avais voulu lui demander si Marc était au courant, mais de la même manière que tu ne lui avais pas demandé confirmation à voix haute, tu t’étais abstenu.
Parfois, il est préférable de ne pas mentionner certaines choses.
« Pour les prénoms, non plus, il n’a pas eu son mot à dire ?
— Es-tu obligé de rendre les choses plus compliquées qu’elles ne le sont ?
— Il n’y a rien de compliqué, Helena. Tu as mis au monde de merveilleux enfants, et ça me comblerait de bonheur d’être leur parrain. »
De les voir grandir de loin, d’assister à leurs anniversaires en leur apportant un cadeau que leur mère t’aura conseillé car, au final, tu ne sauras pas grand-chose d’eux, seulement des bribes. Tu n’assisteras pas à leurs premiers pas, ni n’entendra leur premier mot.
Leur premier « papa » ne te sera pas destiné, de toute manière.
« Leal…
— Non, Helena, tu as raison. Inutile de rendre cela plus compliqué. »
Ce « cela » que vous n’aborderez jamais de vive voix.
Tu t’étais penché une ultime fois sur leur berceau et avais déposé un baiser sur le front de ces êtres qui te paraissaient trop frêles. Si ton silence et ton absence leur permettaient de vivre une vie normale, alors tu les leur offrais. Tu leur devais bien ça, à eux deux, mais aussi à celle dont les yeux brillaient de larmes.
Après tout, c’était la raison pour laquelle tu l’avais laissée partir.
À présent, c’était à elle de le faire.
We fight to cover up the scars
From our charade
Tu te souviens de l’expression d’Arjan quand tu t’es présenté à sa porte avec deux allers simples pour Saint-Pétersbourg. Après un moment de silence, sa réaction a été un pragmatique : « Mais… on ne parle même pas russe ? ». Pas à un seul instant il n’a remis en question le fait de t’accompagner, il avait juste insisté pour faire un détour sur le chemin et acheter Le russe pour les nuls.C’est peut-être à cet instant que tu as réalisé que tu donnerais ta vie pour cet homme.
Prendre la fuite ne te ressemble pas, mais chaque homme a ses limites. Matthias l’avait bien saisi, et il t’avait fait comprendre que ta présence, votre présence, serait plus utile ailleurs.
Et elle l’avait été.
Vous êtes restés quelques années en Russie, ne revenant que ponctuellement sur le sol belge. Vous y aviez étendu votre cercle, démantelé d’autres, et l’aisance avec laquelle tout s’est déroulé t’étonne toujours – d’accord, il y a eu quelques accrocs, mais puisque vous respirez encore, ils ne comptent pas véritablement. Peut-être que vous avez frôlé la mort une fois ou deux, ou dix. Peut-être que vous avez eu des périodes de doutes sur le bien-fondé de vos actions. Mais il suffisait que vous sauviez une vie, ou en éliminiez une en sachant que cela permettrait d’en préserver d’autres, pour que vous vous rappeliez pourquoi vous aviez décidé de vouer la vôtre à votre mission.
Vous avez appris à voler de vos propres ailes : vous n’aviez plus besoin de Matthias pour savoir dans quelle direction aller, et il en était le premier satisfait. Dès le moment où il t’a fourni l’arme pour abattre son ancien comparse et ton ancien mentor, vous avez su que vous marcherez côte à côte, d’égal à égal.
C’est aussi à cette époque que tu as réalisé que tout est mis en œuvre pour que vous ne soyez pas livrés à vous-même. Le fait que vous soyez éparpillés aux quatre coins du monde aurait pu être une faiblesse, mais vous êtes parvenus à en faire une force. Un simple coup de téléphone peut vous connecter entre vous et vous sortir des pires situations, voire vous procurer tous les documents que vous désirez. Mais malgré ce joker indispensable, un mot d’ordre restait de mise : discrétion.
Pourtant, la rumeur selon laquelle un certain Sweven jouait un peu trop bien au nettoyeur et au protecteur des opprimés commençait à enfler. Tu ne t’en es pas soucié : ils ne pourraient pas faire grand-chose avec seulement un alias. Tu tenais plus de la légende urbaine, et il était généralement trop tard pour eux quand ils comprenaient que la légende était réelle.
'Cause you're fighting an endless war, hunting a miracle
And when you reach out for the stars; they just cut you down
Tu te souviens de ces années après la Russie, où tu avais enfin trouvé un équilibre dans ton penthouse liégeois et où tu profitais de ta vie de parrain célibataire. Tes filleuls grandissaient et, en même temps, l’amertume que tu as pu ressentir au début disparaissait. Entendre leurs cris de joie quand ils reconnaissaient le moteur de ta voiture et voir le regard agacé de Marc Peters quand ils couraient dans tes bras sitôt que tu passais le portail valait tout l’or du monde. Tu partais parfois en week-end avec les jumeaux et, comme tes grands-parents avec toi, tu leur apprenais les choses utiles de la vie… et celles un peu moins. Mais comment aurais-tu pu dire non à ta fille…ule quand celle-ci te demandait si elle pouvait monter sur tes genoux et tenir le volant pendant que vous rouliez sur les petites routes de campagne ? Comment aurais-tu pu dire non à Merlin quand il te demandait s’il pouvait t’assister pendant que tu chipotais dans le capot de ta voiture, alors même qu’il avait besoin d’un tabouret pour avoir y accès ? Plus ils grandissaient, plus ils te ressemblaient : les mêmes yeux verts, les mêmes taches de rousseurs discrètes sur le nez, la même soif d’apprendre…Bien sûr, il y a eu des moments où tu t’es demandé si tu avais pris la bonne décision. Comme cette fois où tu les avais ramenés pendant qu’Helena répétait avec le groupe. Tu t’étais retrouvé assis sur une caisse en carton, Sharon à ta gauche et Merlin à ta droite. Les premières notes avaient résonné, et tu n’avais plus pu détacher ton regard d’elle. Parce que c’est dans la musique qu’elle se révélait le plus ; parce que sa voix était encore plus belle que la dernière fois que tu l’avais entendue ; parce que les paroles avaient remué un couteau dans une plaie qui ne s’était jamais refermée ; parce qu’elle s’était souvenue que c’était ton anniversaire alors que toi-même tu l’avais oublié.
Parce que tu n’aimerais jamais une autre comme tu l’avais aimé elle, comme tu l’as aimée ce soir-là, comme tu l’aimes encore aujourd’hui.
« Tu n’es qu’un con », t’avait dit Arjan le lendemain.
Ces instants de normalité relative étaient entrecoupés par ceux où tu partais en mission. À moins que ce ne soit l’inverse ? Quoi qu’il en soit, Arjan et toi ne connaissiez plus de frontières, et quittiez parfois le continent européen. Infiltrations, éliminations, protections… Vous aviez plusieurs cordes à votre arc, comme depuis le début, mais l’expérience vous avait rendus arrogants – surtout toi.
Ta légende te servait maintenant de réputation, sans que personne ne connaisse ton véritable nom ou ton visage, et tu te permettais même l’impertinence de prévenir tes futures victimes de ta venue. Tu changeais parfois la phrase, mais le thème et la signature demeuraient identiques : une demande concernant la dernière chose qu’ils souhaiteraient voir, et un « S. » dans le coin inférieur droit.
Parce que parfois, ça devenait trop facile quand ils ne te voyaient pas venir.
Dans ce flot d’adrénaline constant, tu te serais presque cru intouchable.
Remember when the darkness wasn't all you had to see
Remember when a part of you still hoped for what could be
Tu te souviens du début de la fin.Des attaques de dotés se succédaient en Europe de l’Ouest. Le pattern était le même : des jeunes prenant à peine conscience de leurs capacités se voyaient promettre un monde meilleur s’ils suivaient les directions qu’on leur donnait. Comme Devin avec toi, certes, mais jamais il ne t’avait demandé de braquer une banque ou de massacrer une famille entière, encore moins la tienne. Évidemment, tout ceci était en réalité destinée à faire une mauvaise publicité aux dotés, lesquels étaient rapidement arrêtés, et il devenait pratiquement impossible de les interroger : l’époque où il suffisait de brandir quelconques faux papiers pour avoir accès à des prisonniers était révolue. Et même quand vous y parveniez, ils refusaient de parler.
Il vous a fallu des mois pour obtenir un semblant de piste et découvrir que le point de départ était sous votre nez depuis le début. Des mois durant lesquels vous ne parveniez qu’à capturer des gouttes de cet océan qui faisait la une des journaux au moins une fois par semaine. Mais les autorités ne semblaient pas chercher à comprendre ce qu’il se passait, et les politiques s’étaient emparés des cas pour exiger plus qu’une simple liste.
Matthias l’avait pris comme un affront personnel, car il avait tendance à considérer la Belgique comme son territoire. Toi, tu n’aspirais qu’à éliminer cette vermine qui se trouvait bien trop près de tes enf… filleuls.
Plus près que tu ne le pensais.
« Leal, tu as l’air épuisé…, t’avait un jour dit Helena alors qu’elle t’avait invité à dîner. Est-ce que tu penses seulement à prendre des congés ?
— Tu sais que je ne peux pas.
— Tu es pire que Marc.
— Allons, chérie, était intervenu ce dernier. C’est tout à l’honneur d’Andries d’être aussi assidu au travail, surtout en ce moment. C’est l’un d’eux qui t’a… ? »
Il avait fait un vague geste de la main vers ton poignet bandé, que tu avais ignoré superbement.
« D’ailleurs, Marc, puisque tu abordes le sujet. Quand est-ce que la police va se décider à agir ?
— Nous agissons.
— Ah ? Je n’ai rien remarqué.
— Parce que tu n’es pas de ce côté du terrain. N’est-ce pas ? Nous, on se demande pourquoi les régulateurs de dons ne… eh bien, ne régulent pas davantage. Il faut prendre le problème à sa source.
— C’est ce que nous faisons.
— Visiblement pas, vu que l’on arrête ceux que vous êtes incapables de…
— Ça suffit, vous deux. Je vous ai déjà dit de ne pas parler travail ici, encore moins devant les enfants. D’ailleurs, vous ne vouliez pas demander quelque chose à votre parrain ? »
Sharon, assise à côté de toi, avait posé sa main sur ton bras pour que tu la regardes. Elle devenait une adolescente, mais l’enfance marquait toujours ses traits, et son sourire restait empreint d’une candeur qui te rappelait pourquoi tu avais renoncé à elle, à eux.
« Qu’est-ce qu’il y a, mon chat ?
— On pourra repartir en week-end avec toi ? Ça fait longtemps.
— Plus d’un an, avait précisé Merlin sans lever les yeux de son assiette.
— On est grands maintenant, si t’as une urgence tu pourras vite y aller au lieu de devoir nous conduire chez papi. C’est pour ça que tu n’as plus voulu ?
— Ce n’est pas que je n’ai plus voulu, c’est juste que…
— T’as pas le temps, on sait, avait maugréé Merlin. C’est Sha’ qui a encore la naïveté de croire que tu pourras nous accorder deux jours. C’est déjà un miracle que tu nous accordes une soirée.
— L’écoute pas, parrain, il fait sa crise d’ado. Alors ? S’il te plaît. S’il te plaît. S’il te plaît. »
Tu revoyais la petite fille qui secouait ton bras en te suppliant de la prendre sur tes genoux pour tenir le volant dans les petites routes de campagne. Tu revoyais l’adorable bambine qui articulait maladroitement le mot « parrain » pour la première fois.
Tu revoyais le sourire de Camille une fraction de seconde avant que tu ne lui ôtes la vie.
« Hum… Je… Oui, on fera ça. Bientôt.
— Promis ?
— Tu sais que je ne…, avais-tu commencé à dire, mais ton habituel discours sur les promesses s’était évanoui face aux grands yeux verts. Oui, promis.
— Il n’y a vraiment que ta filleule pour te faire craquer ainsi, Leal. »
Vous saviez tous les deux que c’était faux. Le regard que vous aviez échangé en disait long, en disait trop. Une fois de plus, tu t’étais demandé ce qu’aurait été ta vie si tu étais resté ; si tu l’avais retenue.
Ça aurait probablement été un désastre.
And now you're playing with matches
Come out of the ashes underneath you
Tu te souviens du hurlement d’Arjan, si déchirant que tu as eu l’impression qu’il rampait sous ta peau. Tu le revois s’effondrer à genoux, les paumes plaquées sur les yeux, tandis que la femme lui faisant face affichait la même expression que si elle venait d’accomplir un miracle.Ce qui n’avait été qu’une petite intervention dans un entrepôt anversois avait viré au drame.
Et cette garce avait l’audace de sautiller sur place. D’abord de joie, et puis de douleur quand tu lui avais tiré dans le pied dès que tu t’étais débarrassé de ton propre adversaire. La scène était chaotique : Arjan psalmodiait des variantes de « Je ne vois plus rien ! Putain fais quelque chose, je vois rien ! » tandis que la dotée s’écroulait au sol dans un mélange de cris, de larmes, et de rires.
Celle qui se tortillait au sol vous avait appris que c’était un piège tendu spécialement pour vous. Deux de vos assaillants étaient d’anciennes connaissances russes qui avaient une dent contre vous ; le troisième avait la capacité de mettre vos dons en sourdine, te rendant moins efficace que d’ordinaire ; la quatrième manipulait le sang et avait causé une occlusion veineuse rétinienne à Arjan, le rendant aveugle. Arjan qui n’avait été qu’un dommage collatéral : tu étais la cible initiale de ce sort funeste. Le but n’était même pas de te tuer, simplement de te contraindre aux ténèbres. Elle ignorait tout du commanditaire, excepté qu’il aurait la preuve de ta cécité sans qu’elle n’ait besoin de la lui apporter. Accessoirement, il lui avait également promis un monde meilleur pour les dotés, chose impossible tant que tu serais en mesure de fourrer le nez dans leurs affaires – un bon classique qui marche toujours pour motiver les troupes ; un classique devenu habituel ces dernières semaines.
Bien entendu, elle t’avait tout expliqué en échange de ta promesse de lui laisser la vie sauve.
Bien entendu, tu l’avais saluée d’une balle dans le crâne avant de récupérer Arjan et de partir loin de là.
Depuis le début, c’est une guerre silencieuse pour maintenir l’équilibre, forcément qu’il y aura des pertes, et tu ne peux pas sauver tout le monde. Tu l’as appris avec Camille, tu as eu une piqûre de rappel dans l’entrepôt anversois. La cécité d’Arjan est tombée comme un couperet, et tu as noyé ta culpabilité sous une rage inédite. Trouver les enflures qui manipulaient les dotés avait toujours été primordial pour le bien commun, mais dès l’instant où ils avaient posé la main sur lui, c’était devenu personnel.
Malgré ta quête de vengeance, tu n’avais pas négligé Arjan, dont tu es devenu les yeux – en dépit de ses protestations. Tu gérais ses crises d’angoisse et de colère ; tu t’efforçais de rendre son quotidien plus supportable ; tu lui promettais que, dès que tu aurais abattu l’enfant de salaud qui avait eu l’audace de se dresser sur votre route, vous chercheriez une solution. Parce qu’il y avait trop de dons pour que ce soit impossible, parce que même les médecins ne perdaient pas espoir quant à un possible rétablissement.
« Quand celui qui a orchestré ça comprendra que ça n’a pas suffi pour que tu te ranges, il recommencera. Et cette fois, il ne se contentera pas de te faire peur.
— De un, il ne m’a pas fait peur. De deux, tu dis ça car tu aimerais que je reste tout le temps ici, à prendre soin de toi.
— Je ne peux rien te cacher. Mais tu m’as mal compris : je ne dis pas que tu dois prendre ta retraite, mais que tu es rouillé.
— Rouillé ? Tu m’as bien regar… erm…
— … Passons. Tu comptes trop sur ton don : tu as complètement été pris au dépourvu. Tu peux profiter de mon handicap maintenant pour essayer de me mentir, mais ce jour-là j’ai bien vu ton expression. Tu te souviens de ce que nous disait Devin ? On ne doit pas se reposer sur nos acquis. Dries, non seulement tu t’affaiblis en me permettant de voir aussi souvent, mais tu ne me rends pas service. Tu n’es pas toujours là. Alors, on va arrêter de vivre comme un couple marié sous le même toit. »
Tu as eu beau lui dire que tu n'y voyais, sans mauvais jeu de mots, aucun inconvénient et qu'il faisait un mari supportable, Arjan est aussi têtu qu'il aime le son de sa propre voix. Il voulait que tu sois prêt à toutes les éventualités. Selon lui, si celui qui vous avait tendu ce guet-apens ne te tuait pas, il ne te laisserait pas repartir avec ta vue intacte pour autant : il devait forcément savoir que tu en avais besoin pour la majeure partie de ton don vu ce qui t'était à la base destiné.
Is it worth dying for?
Or are you blinded by it all?
Tu peines à te souvenir des détails de ta descente aux enfers. L’adrénaline qui courait dans tes veines a annihilé tout bon sens.Quelques moments clés restent cependant gravés dans ta mémoire :
Ton soufflement de nez désabusé, proche du rire, en découvrant que celui qui tirait les ficelles n’était nul autre que Marc. Ce même Marc qui t’avait tendu une bière et qui t’avait promis de retrouver ceux qui avaient infligé cela à ton, officiellement, collègue ; qui avait la manie de passer son bras autour de la taille d’Helena quand il vous rejoignait pendant que vous discutiez – geste qu’elle supportait de moins en moins – ; qui ébouriffait les cheveux de Merlin et de Sharon comme s’ils étaient ses propres enfant ; celui qui apparemment tolérait que tu empiètes sur sa vie familiale mais pas dans ses affaires ; celui qui venait de te prouver qu’il était possible de jongler entre deux vies, et par extension de te démontrer ô combien tu avais été faible et lâche. Incapable. Indigne.
Il y avait aussi eu la colère d’Arjan, si semblable à la tienne bien que sa source différait. Tu lui avais tout expliqué sur le trajet menant à chez Helena ; tu ne pouvais décemment pas le laisser seul alors que tu ignorais quand, si, tu reviendrais. Chacune des réponses que tu lui donnais semblait être mauvaise. Non, tu n’avais pas cherché à savoir d’où Marc détenait ses informations. Oui, tu savais où il était à l’heure actuelle, et non tu ne comptais pas lui laisser la moindre chance de prendre la poudre d’escampette si ce n’était pas un piège. Car oui, c’en était probablement un, mais qu’importe. Une pensée dominait les autres : tuer ce fils de pute. Coûte que coûte. Tu le devais pour tous les dotés qu’il avait abusés, tu le devais pour Arjan, pour Helena, et par-dessus tout pour les enfants. Certaines phrases de ton comparse de toujours restent gravées dans ta mémoire : « Je suis aveugle, est-ce que tu veux empirer mon cas ? Est-ce que tu veux que j’aie la mort de mon meilleur ami sur la conscience ? Ne me laisse pas en arrière. Ne me laisse pas dans le noir. »
Et bien évidemment, comment pourrais-tu oublier la dernière fois où tu l’as tenue dans tes bras, la première fois où elle a tenté de te retenir ? Quand tu avais voulu la rassurer, en prétendant que tout irait pour le mieux une fois que tu serais de retour, elle avait secoué la tête. « Leal, tu ne comprends pas… Je sais que tu vas y arriver. Et je ne suis pas aveugle, je sais que ça concerne Marc. Qu’importe ce dont il est question, quoi que tu fasses, j’ai confiance en toi et en ton jugement. Tu te souviens ? Ça ne changera jamais. Mais… je sens, je sais, que tu ne reviendras pas. » Venant d’elle, tu savais ce que ça impliquait. Mais tu n’as pas hésité, ni à ce sujet, ni quand tu es venu cueillir ses lèvres. À moins que ce ne soit elle qui ait initié le geste ? Qu’importe. Elle a murmuré un « Je t’aime, reviens-moi », et tu es parti.
Le piège a été confirmé, mais Marc t’avait sous-estimé – et pour être honnête, tu t’étais sous-estimé toi-même. Il était le dernier debout face à toi. Et peut-être que tu étais en plus mauvais état, peut-être que tu voyais trouble et que tu n’étais pas certain que les bruits que tu entendais étaient les battements de ton cœur ou des renforts (ceux qui n'auraient aucun scrupule à abandonner ton cadavre au fin-fond d'un bois car Marc n'avait pas impliqué les flics dans ses manigances, vu son poste il n'avait pas besoin qu'ils soient au courant de quoi que ce soit pour manipuler l'enquête à sa guise) qui arrivaient, mais ton bras qui le tenait en joue ne tremblerait pas. Il avait tenté de faire le fier, clamant que tu ne parviendrais pas à viser dans de telles circonstances.
En réponse, tu avais juste souri, sans lâcher des yeux l’homme que tes enfants appelaient « papa », celui que ta bien-aimée étreignait chaque soir, celui auquel tu avais cédé la place qui aurait dû être tienne.
Une détonation plus tard, tu rendais tes enfants orphelins, et la femme que tu aimes veuve.
Sans le moindre regret.
Helpless and ruined,
left for dead and rendered useless
À partir du moment où tu as abattu Marc, tu es incapable de discerner les vrais souvenirs des hallucinations. Tu n'as ainsi pas la moindre idée de quand ou de comment tu as été neutralisé lorsque les renforts sont arrivés, ni de par quel miracle tu respires toujours. Tout ce que tu sais, c’est que tu as été laissé pour mort dans les cales d’un bateau, avant de finir dans un lit d’hôpital à Tapë Roa, dans lequel tu es resté plusieurs semaines. Mois.
Tu le sais pourtant qu’utiliser ton don au-delà de tes limites est la dernière chose à faire – après, pour ta défense, tu pensais que ce serait effectivement la dernière chose que tu ferais. Tu as ponctuellement eu des piqûres de rappel par le passé, lesquelles ont obligé Arjan à veiller sur toi en partie pour ta sécurité, principalement pour celle des autres. Car il t’est déjà arrivé de réellement mal entendre ce que te disait ton interlocuteur, de tirer dans le vide en jurant voir un gars venu pour te descendre, voire d’embrasser Arjan dans le cou parce que tu pensais qu’il s’agissait d’Helena et, accessoirement, d’un rêve. Plus rarement, tu as déjà perdu complètement l’un de tes sens. Jamais plus de quelques heures, cependant.
Jusqu’à cette fois-ci.
Les médecins ont été complètement déconcertés par ta cécité. Évidemment, leur parler de ton don aurait facilité leur boulot, mais… à aucun moment tu ne l’as envisagé. Tu venais d’avoir la preuve que celui-ci permet de faire le lien avec « Sweven » – merci Marc – et tu ne comptais pas réitérer l’expérience, pas alors que les flics te tournaient autour. Heureusement, ils te considéraient comme une victime, et les médecins te protégeaient quand ils devenaient trop insistants, pour ne pas dire suspicieux – à raison. C’est d’ailleurs grâce à cela que tu as pu sortir ta carte joker : tu as eu droit à un coup de téléphone pour tout arranger avant qu’ils ne reviennent à la charge avec leurs questions.
Ta nouvelle identité sera donc Lorcán Eyler Hyde – ça avait beaucoup fait rire celui que tu avais eu au téléphone –, irlando-américain, qui dédie sa vie à la compréhension de la synergie entre le don et le doté – tu as même écrit plusieurs articles à ce sujet, tous disponibles en ligne, si si. Te rapatrier chez toi n’est pas à l’ordre du jour : officiellement parce que, après avoir échappé à une (apparemment) tentative d’assassinat tu préférais éviter ; officieusement parce qu’ils jugent préférable que les alliés de Marc te pensent mort.
Et puis, sans offense, autant ils sont là pour couvrir tes arrières, autant… tant que tu es aveugle, tu seras moins un poids au milieu du Pacifique.
Tu es sorti de l’hôpital fin avril 2021, après une rééducation et surtout une éducation vu ta nouvelle condition, et tu as commencé à bâtir ta nouvelle existence , seul. Tu es devenu accompagnant dans le Contrôle et l’Acceptation du Don début mai, ironiquement dans ce même hôpital, à mi-temps, mais aussi dans un cabinet privé. De temps à autre, tu joues même les consultants. Et sincèrement, si tu n’avais pas été un agent au service du bien commun, peut-être que c’est la vie que tu aurais aimé avoir.
À quelques détails près.
- Hasna Al-NejemQuitte ou double !
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Re: Lorcán E. Hyde • You picked a dance with the devil and you lucked out [DC Min Jun Lee]
- Naïla BlackwoodLa mer ne m'a pas prise
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Re: Lorcán E. Hyde • You picked a dance with the devil and you lucked out [DC Min Jun Lee]
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Re: Lorcán E. Hyde • You picked a dance with the devil and you lucked out [DC Min Jun Lee]
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Re: Lorcán E. Hyde • You picked a dance with the devil and you lucked out [DC Min Jun Lee]
- Istvan FersenCo-fonda • Modèle de Géricault
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Re: Lorcán E. Hyde • You picked a dance with the devil and you lucked out [DC Min Jun Lee]
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